Voilà une semaine que le collectif Pas de Justice, Pas de Paix a initié une opération sur Twitter, réellement bouleversante, via le lancement d’un hashtag nommé #jenaipasportéplainte inspiré du #ididnotreport utilisé dans le même objectif il y a quelques semaines au Royaume Uni. Pour les non-initiés à l’oiseau bleu, le hashtag fait office de mot-clé permettant aux twittos de s’insérer dans un fil de discussion dédié à une thématique.

Dans ce cas bien particulier, ce sont des milliers de témoignage de viols et des raisons pour lesquelles la plainte n’a pas été déposée qui ont fleuri sur le réseau social de microblogging. Bouleversant, touchant et à saluer dans l’optique de sensibiliser une société globalement machiste qui se moque plus volontiers de la victime en lui niant le droit de déposer plainte par des attitudes parfaitement décrites dans les différents billets d’Antisexisme sur les mythes sur le viol.

La campagne a été un franc succès comme le décrit Sandrine Goldschmidt dans son article de remerciement.

Malheureusement, cela a été aussi un véritable nid à trolls, rappelant comme certains utilisateurs peuvent se révéler nauséabonds et haineux. Même si tout n’est pas jeter dans le troll, certains pouvant être constructifs et apporter quelque chose de très utile à la communauté comme le souligne Antonio A. Casilli sur son blog, dans le cas qui nous intéresse, ce fut un flot de tweets alternant entre un humour douteux et déplacé et de véritables agressions verbales au coeur d’une opération qui se voulait avant tout un catharsis virtuel pour les victimes de viol pouvant s’exprimer sur Twitter de manière parfaitement anonyme (ce qui facilite la communication sur un sujet aussi douloureux, vous en conviendrez).

Cet exemple de trollage en règle met en lumière une évidence inquiétante: le féminisme « tâche », agace, est mal compris; la plupart des féministes sont perçus comme des femmes hystériques désirant la suprématie sur l’homme, son asservissement à des choses innommables telles que l’amour anal avec des concombres encore sous cellophane (bon là j’abuse ^_^) ou l’existence cachée d’un porno féministe remettant au centre de cette espace de création le plaisir féminin (là par contre, c’est une idée à creuser et ça n’a rien de castrateur pour l’homme, hormis peut être pour le pornophile décérébré qui pleure la fermeture de megaporn)

Bref, je grossis profondément le trait mais c’est une véritable inquiétude. Comme si la société machiste, considérant instinctivement comme une menace la parité homme/femme, se cabrait pour fustiger le mouvement féministe dans son ensemble et l’incriminer de mille maux, basés essentiellement sur des on-dits et des légendes urbaines (non, les féministes ne sont pas des lesbiennes mal baisées qui ont les aisselles foisonnantes de poils, ô mon Dieu, pas épilés)

Ainsi, comme le souligne Crêpe Georgette sur son blog, le Godwin point d’une discussion avec un(e) anti-féministe passif se conclut souvent par la mise en avant d’un humanisme sirupeux et écoeurant qui occulte complètement la cause féministe . N’oublions pas en effet que dans une société soit-disant humaniste, certaines morts sont moins graves que d’autres, selon les orientations voulues par les groupes dominants. Regardez justement l’effervescence suite à une certaine fusillade ainsi que les commentaires qui ont fusé un peu partout et vous verrez que cette humanisme gluant d’hypocrisie n’est que le reflet d’une réaction émotionnelle bien loin du militantisme féministe qui essaie avant tout de se baser sur des faits et non sur l’hystérie que l’on souhaite lui faire porter.

Toujours dans le constat pessimiste d’un féminisme mal compris, je découvre que les g33ks sont remarquablement sexistes (question, parlons nous de nerdz ou de g33ks). Je découvre, au fond, pas vraiment, ayant fréquenté beaucoup de geeks et ayant malheureusement constaté que le fait de ne pas avoir de contacts fréquents avec des femmes a tendance à endurcir le bestiau dans le mauvais sens du terme. Soyons clair, ce que dit est 2goldfish dans son billet sur BoumBox est malheureusement vrai. Le g33k moyen a la vanne facilement grasse et sexiste. Et je ne serais tout simplement pas surpris que les fameux trolls sur le hashtag #jenaipasportéplainte soient des geeks potentiels ou en puissance.

Je finis mon constat sur ce billet  d’Eve sur le blog Le Mauvais Genre qui m’a fait sourire, car il décrit une vérité évidente (si si testez en soirée et vous verrez comme ces situations sont d’une évidence même) . Les sexistes, ce sont les autres pas moi, voilà ce que nous aimerions tous penser. Cela rappelle le même raisonnement pour les racistes et les mauvais conducteurs. Étonnant, non?

Pourtant, il faut reconnaitre que nous avons tous été élevés dans des sociétés où la domination masculine fait règle et ce sont ces schémas de pensées qu’il faut restructurer pour construire une égalité réelle puisque, ne l’oublions pas, c’est la valeur profonde que défend le féminisme.

Pour boucler avec ce que je disais en préambule, le féminisme n’est pas et ne sera jamais la domination de la femme sur l’homme (ou sinon je suis profondément masochiste étant un homme 😉 ). Bien au contraire, c’est accepter et mettre en place des structures adéquates pour permettre aux esprits de changer vers une parité à tous les niveaux de la société, tant privés que publics.

Je clos ce billet sur cette pétition qui constitue à mon sens une de ces briques nécessaires pour aller vers une prise de conscience de notre société des efforts qu’il reste à faire pour permettre aux femmes d’évoluer et de vivre sans craindre d’être violées, sans devoir traîner pendant des années la honte d’avoir été victime d’un viol dont elles ne peuvent parler. Mettre les institutions devant leurs responsabilités en leur rappelant que donner un espace de parole et permettre que les plaintes soient déposées et traitées est de  leurs devoir…