Category: Humeur libre


Informer ne devrait jamais être un délit encore moins un crime. Pourtant, année après année, notre classement chez Reporters sans Frontières ne s’améliore pas et stagne à un niveau assez consternant pour un pays, considéré comme étant la patrie des droits de l’homme.

Cette semaine n’a pas été avare en avanies infligées aux journalistes qui ont pour sacerdoce de transmettre au citoyen des informations d’intérêt public.

Quand la DGSI convoque pas moins de 8 journalistes ainsi que le président du directoire du « Monde », il y a lieu de s’inquiéter sur la santé de notre démocratie. Notons que la DGSI, ce sont les renseignements pour la sécurité intérieur, en gros, celles et ceux qui luttent, entre autre, contre le terrorisme.

Convocations à la chaîne

Si les convocations émises par la DGSI sont parfaitement légales, il y a lieu de s’interroger sur cette obstination à vouloir protéger à tout prix ces ventes d’armes françaises à l’Arabie Saoudite.

Disclose en a fait les frais (ainsi qu’un journaliste de Radio France) suite à la publication de son enquête sur cette vente d’armes qui pourrait avoir conduit à la mort de civils au Yémen.

Cette semaine, c’est au tour d’Ariane Chemin de « bénéficier » de ce traitement de faveur de la part de la DGSI. Sa participation à l’enquête sur l’affaire Benalla avait mis en avant des liens entre Alexandre Benalla et Chokri Wakrim, un ancien militaire qui aurait travaillé avec un oligarque russe.

Cette nouvelle convocation n’est pas sans conséquence au point qu’à l’étranger, le Washington Post présente le sujet sous l’angle d’une journaliste convoquée par la police pour avoir enquêté sur une affaire de corruption dans les plus hautes strates de l’État.

Un procureur zélé

Derrière ces convocations, un homme, procureur de son état, Rémy Heitz, nommé par l’Élysée en fin d’année dernière à ce poste. Cette nomination a secoué la magistrature qui souhaite continuer à garder son indépendance face à un pouvoir exécutif bien trop présent.

Comme le détaille cet article de Mediapart, Rémy Heitz est vraisemblablement à l’origine de ces convocations mais aussi de la fameuse perquisition de février dernier visant les locaux de Mediapart. Il s’agissait cette fois-ci de se saisir des bandes publiées par le journal reprenant les échanges entre Alexandre Benalla et Vincent Crase. Le journal a refusé la perquisition et ainsi préservé le secret des sources.

Au delà de la liberté d’informer qui est menacée, ce sont aussi des signaux forts susceptibles de décourager des sources de témoigner de possibles irrégularités jusque dans les couloirs du pouvoir.

Cette traque lancée par la DGSI et, orchestrée à priori par un procureur désireux de protéger des secrets d’État, laisse entendre que les enquêteurs recherchent un(e) journaliste qui cédera face à ces pressions en révélant l’origine de ses informations.

Bien heureusement, il est encore possible, pour l’instant, de faire appel à la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse comme l’explique fort justement Luc Bronner, directeur des rédactions du Monde au micro de France Inter.

Une liberté d’informer menacée

Fait concomitant tout aussi inquiétant : l’approche des élections européennes et la communication politique associée.

La Voix du Nord révélait cette semaine avoir reçu une invitation de la part de l’Élysée à rédiger un publi-article en faveur d’Emmanuel Macron. A travers une interview donnée à l’ensemble de la presse quotidienne régionale, celle-ci devait être relue par les services du président avant autorisation de publication. Hormis la Voix du Nord et le Télégramme, tous ont souscrit à cette opération savamment orchestrée, piétinant ainsi toute notion d’indépendance éditoriale comme Acrimed le soulignait à force d’exemples .

Il peut s’agir, bien entendu, d’un choix qui revient au rédacteur en chef de chaque média quant à accepter ou non les injonctions politiques.
Néanmoins, n’est-il pas aussi nécessaire de pouvoir faire en sorte de protéger ces mêmes médias de pressions politiques aussi importantes ?

En « Macronie », le journaliste n’intéresse pas

Emmanuel Macron n’a jamais caché sa volonté de vouloir contrôler la presse, et ce, dès le début de son mandat.

Mis en parallèle avec les convocations intimidantes de la DGSI, il est à s’inquiéter de ce besoin de la présidence à n’avoir qu’un seul son de cloche – positif – dans la presse, qu’elle soit télévisée, écrite ou encore radiophonique. Et cela ne peut qu’intéresser des ONG comme Reporters sans Frontières qui veillent tant bien que mal à alerter gouvernements comme populations face à aux dérives vis à vis de la liberté d’informer, garantie indispensable à la bonne santé d’une démocratie.

Rappelons les propos du président en 2018 à l’égard des journalistes :

Pour clore cette actualité glaçante, notons que les militants LREM adoptent progressivement les mêmes méthodes de harcèlement à l’égard des journalistes que les pires trolls de l’extrême droite comme le montre cette enquête.

Gardons également en tête que le gouvernement a « commis » une campagne de lutte contre les fausses informations qui passe royalement à côté de ce qu’est réellement l’éducation aux médias.

Ces convocations sont loin d’être innocentes et demandent que nous restions solidaires des journalistes qui continuent jour après jour de prendre des risques pour informer sur des affaires qui nous concernent toutes et tous.

A défaut d’une conclusion plus éloquente, je ne ferais que boucler cet article en rappelant qu’en « Macronie », la démocratie ne passe pas par la liberté des journalistes à informer sur les sujets de leur choix…

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Depuis le 17 novembre dernier, la France est agitée de soubresauts provoqués par un mouvement dit des gilets jaunes dont le quatrième samedi de mobilisation vient de s’achever.
Que l’on soit pour ou contre, on ne peut nier l’impact considérable des réseaux sociaux dans leur organisation et plus particulièrement de Facebook.

Et comme tout mouvement né sur les réseaux sociaux, la guerre informationnelle fait rage avec son lot de fake news partagées aussi bien par les pro gilets jaunes que par leurs opposants.

La réponse du gouvernement

Mais voilà que je tombe au grès de mes pérégrinations sur cette vidéo poussée par le gouvernement pour faire la peau aux fake news. Je vous laisse déjà vous faire votre idée sur le sujet :

L’action de communication est salutaire en cette période de troubles où toute information devient vraie du moment qu’elle est hurlée et partagée par un grand nombre de personnes.

Néanmoins, prenons du recul et analysons le discours. Les premières secondes partent bien avec un décorticage en bonne et due forme des mécaniques sous-jacentes à la viralisation d’une fausse information avec une insistance particulière sur la manipulation des émotions.

En effet, un bon post sur les réseaux sociaux qu’il soit vidéo, photo ou textuel, doit engager la cible pour qu’elle ait envie de la partager. Pour pousser plus loin le raisonnement, il convient aussi de se poser les questions suivantes que je détaillais dans cet article :

  • Qui est l’auteur de la fausse information ?
  • A qui profite la manipulation ?
  • Quel est l’objectif visé ?

Sauf que l’intervenante, et le gouvernement par son entremise, choisissent de prendre un raccourci en mettant en place la vision de médias traditionnels qui seraient détenteurs de la vérité. Ce qui est un comble quand on constate à quel point la liberté de la presse est mise à mal depuis plusieurs années en France (33ème pays selon RSF).

Conspuer le vecteur de la fake news

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Le discours se dégrade par la suite. Selon l’experte mandatée par l’Etat, il faudrait presque ridiculiser la personne partageant la fausse information pour inverser la tendance.

Erreur de communication notoire qui ne peut pas conduire à ce cercle vertueux où tout un chacun serait capable de discerner le vrai du faux pour ne partager que des informations vérifiées et authentiques.

Bien au contraire, une telle attitude ne peut conduire qu’à la radicalisation de ces personnes humiliées publiquement pour avoir osé partager une fausse information.

Algorithmes de la peur et de la haine

Soulignons au passage qu’une telle attitude conduira invariablement à un débat stérile sous le post en question. L’effet indésirable premier sera que les algorithmes de Facebook donneront une visibilité plus importante à la fameuse fake news parce que ce qui fait qu’un post viralise sur les réseaux sociaux passe avant tout par la prise en compte du :

  • nombre de likes, réactions reçus
  • nombre de commentaires déposés sous le post
  • nombre de partages

Rappelons à ce titre la mécanique très bien appliquée par Konbini comme l’explique Un Créatif dans sa vidéo :

Monter les gens les uns contre les autres ne silenciera pas les fake news et ses producteurs, bien au contraire…

Chacun-e bien dans sa bulle

Ajoutons que le second effet de l’algorithme magique de Facebook sera de vous emmener progressivement dans une bulle de filtre fort salutaire à travers laquelle vous ne verrez plus que des contenus à votre goût.

bulle

Mark Zuckerberg, pour lutter contre les fake news, décida début 2018 de donner la priorité aux posts de vos amis mais aussi à ceux des groupes auxquels vous adhérez. Au final, ce ne fut qu’un coup de pouce maladroit à cette bulle de filtre largement exploitée par le mouvement des gilets jaunes.

L’entre-soi ainsi facilité favorise la circulation des fausses informations avec un enfermement complet dans un écosystème informationnel propice aux manipulations émotionnelles et cela aussi bien pour les pro gilets jaunes que pour leurs détracteurs.

Alimenter le clivage

Cette vidéo conclut par le fait que n’importe qui peut se faire avoir par une fausse information. Ce qui est une vérité absolue dans laquelle se glissent pourtant certains points dérangeants.

L’intervenante emploie le terme de « dogmatique » et souligne l’impact des croyances des personnes partageant des fausses informations. Soyons honnêtes un instant : nous sommes toutes et tous sous l’influence de nos croyances et des biais se créent dès le départ.

Le biais de confirmation expliqué par Nicolas Gauvrit et déjà évoqué dans ses colonnes à l’occasion de l’élection de Donald Trump nous touche toutes et tous sans exception que l’on soit producteur de fake news ou fact-checkeur confirmé.

Vouloir déterminer à l’avance qui sont les bons de l’information des méchants de la fake news est la manifestation d’une propagande peu élaborée dont l’objectif ne devrait pas être la désinformation étatique à peine camouflée.

A défaut de vouloir manipuler, fournir aux populations des outils pratiques afin de pouvoir se forger une opinion face à un ensemble de faits serait bien plus tributaire pour une société où le vivre ensemble devrait être la visée finale.

Poser les bonnes questions

En clôture, je ne peux que vous encourager à vous poser les bonnes questions lorsque vous êtes confrontés à une information. A l’heure où la liberté d’informer est menacée par les forces de police, les journalistes restent un des derniers remparts à défendre face à la propagande et à la désinformation.

Concluons par cette méthodologie en vidéo sur les bons réflexes à adopter sur les réseaux sociaux face à une information (et garantie sans intention de manipuler à des fins de propagande) :

 

Ce titre à peine provocateur m’est venu en pensant à la fameuse citation de Peter Thiel à propos de l’évolution technologique car depuis Blade Runner premier du nom, nous attendons toujours les voitures volantes et qu’à ce jour nous n’avons eu que 140 caractères (bon 280 à partir d’aujourd’hui mais ce n’est pas le sujet)

Pour contextualiser, je tombe sur cette vidéo:

Je ne le cache pas et je n’en ai pas honte : je suis féministe même si je suis un homme blanc cisgenre et d’une orientation sexuelle qui ne regarde que moi.

Cela étant, n’avez-vous pas l’impression que cette vaste campagne pour intégrer l’écriture inclusive à toutes les sauces au point que certains médias (que j’apprécie) le revendiquent est un vaste enfumage pour faire oublier des choses toutes aussi graves qui se déroulent ici en France et continuent d’éborgner continuellement le droit des femmes ?

Le féminisme comme outil de diversion

Petit retour en arrière sur les derniers évènements en date.

Le 1er octobre,  une tuerie de masse a lieu à Las Vegas avec 59 morts au compteur. Le débat sur la libre circulation des armes aux États-Unis reprend de plus belle pour être éclipsé assez rapidement par un autre scandale sordide.

Le 5 octobre, un secret de polichinelle est éventé par le New York Times et les actes de harcèlement sexuel du désormais tristement célèbre Harvey Weinstein gagnent à être dévoilés à travers le hashtag #MeToo lancé par l’actrice Alyssa Milano. Les témoignages pleuvent et offrent un espace cathartique évident.

Cela tombe très bien : le débat sur la libre circulation des armes devenait problématique et il convenait de trouver une nouvelle tactique de diversion pour évacuer le problème rapidement et proprement tout en se donnant bonne conscience.

#Balancetonporc et après ?

Dans la foulée le 13 octobre, la journaliste Sandra Muller lance le  hashtag #balancetonporc pour dénoncer en France harcèlements et agressions sexuelles.

Comme pour #Metoo la communauté s’engage et la parole est libérée dans l’emballement médiatique que cela génère.

S’ajoute 14 jours plus tard le 06 anti-relou pour lutter contre le harcèlement de rue qui sera désactivé en urgence suite à une attaque de membres du forum 18-25 de jeuxvideo.com.

La journaliste Nadia Daam se trouve à son tour harcelée et agressée par cette même communauté pour avoir osé parler de cette dernière affaire (et harceler comme troller n’ont jamais été des méthodes pour faire part d’un point de vue divergent)

Une belle spirale de haine où les communautés continuent de se radicaliser encore plus que ce soit du côté féministe ou anti-féministe. Après tout, l’élection de Trump, c’était il n’y a qu’un an et il n’y a pas de raisons de tirer de leçons…

Vers un féminisme réellement inclusif ?

Voilà, nous sommes en 2017. Nous voulions l’égalité des genres et nous avons eu le langage épicène.

Qu’est-ce qui a vraiment dérapé ?

La radicalisation y est sans doute pour beaucoup. Cultiver des espaces publics non-mixtes ne peut que reproduire la ségrégation genrée orchestrée par des hommes par le passé. Déterminer le droit à la parole d’une personne selon son genre, son origine ethnique ou la couleur de sa peau ne peut que conduire à l’exclusion et au communautarisme si délétère pour une démocratie réellement ouverte à toutes et à tous.

Je l’ai déjà écrit dans ces colonnes : refuser de comprendre son opposant et le ranger directement dans une case sans ne plus vouloir le considérer comme un être humain (c’est-à-dire une personne avec laquelle l’on interagit), cela revient à aller stupidement mettre le feu à des voitures civiles de policiers.

Ou bien se déclarer homosexuelle par « engagement féministe », mais aussi par haine des hommes tout en alimentant les théories homophobes qui prétendent que l’homosexualité est un choix.

Et cela ne fait qu’alimenter le discours et l’eau au moulin des anti-féministes de tout bord.

Méfiez-vous d’ailleurs : ils sont bien parvenus à mettre au pouvoir aux États-Unis un président masculiniste.

Rien ne dit que ça ne se passera pas en France à terme et nous aurons, en tant que féministes, notre responsabilité dans ce possible drame…

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Les algorithmes dominent à présent nos vies au point que l’on incrimine volontiers nos bulles de filtrages, responsables partiels de l’élection du nouveau président américain Donald Trump.

Cela dit, dans quelle mesure ces mêmes algorithmes ont-ils un impact sur notre vie amoureuse à l’heure du tout numérique ?

Petit retour dans le temps (qui ne va pas me rajeunir au passage ^_^ )

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Le réveil est rude pour le monde entier : Donald Trump est président des Etats Unis et prendra ses fonctions en janvier 2017.

Pourtant, les pitreries de celui qui a été surnommé roi des trolls le disqualifiaient d’emblée chez les instituts de sondages comme chez les médias.

Les prévisions de Michael Moore, qualifiées de fantaisistes à l’époque, se sont réalisées et bien qu’un sondage à la méthodologie à priori plus scientifique annonçait avant l’élection la victoire de Donald Trump, rien n’y a fait.

L’heure n’est plus à savoir si nos outils de sondages et nos médias sont dans l’erreur mais bien plus à se poser la question du pourquoi nous ne sommes même plus capables de communiquer efficacement avec ces personnes pro-Trump qui pensent que des valeurs basées sur le racisme, le sexisme, l’homophobie ou plus communément la haine de celles et ceux qui leur sont différents constituent un ciment viable pour la société de demain.

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